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Depuis le déclenchement de l'affaire DSK, on parle de crimes et d'infractions qui ne sont pas définis de la même façon en France et aux Etats-Unis.
Viol et agressions sexuelles
Avant la loi du 23 décembre 1980, le viol, qui n'avait pas été défini dans le Code pénal, était compris en jurisprudence comme "un coït illicite avec une femme sans son consentement". Il s'agissait exclusivement d'une relation vaginale. Depuis 1980, c'est "l'acte de pénétration" qui caractérise le viol. On ne fait pas de différence entre le coït, la sodomie ou la fellation imposés à la victime. Il s'agit d'un crime puni de 15 ans de réclusion criminelle (20 ans, 30 ans ou perpétuité selon les circonstances aggravantes).
Le droit américain établit une distinction entre les rapports sexuels oraux ou anaux ("sexual abuses") et le coït traditionnel ("rape"). Aussi retient-il, en présence d'une fellation forcée et d'une tentative de pénétration vaginale, deux qualifications distinctes : l'agression sexuelle et la tentative de viol.
L'approche américaine retient une infraction distincte pour chacun des actes commis au cours de l'agression et additionne ensuite les peines applicables. Il s'ensuit une accumulation impressionnante de chefs d'inculpation et une peine théorique très élevée. Un juge français ne reprocherait pas à l'auteur d'un viol le fait qu'il ait retiré ou tenté de retirer de force les vêtements de la victime au préalable. Pour lui, ce fait s'intègre à l'agression sexuelle considérée dans son ensemble. Aux Etats-Unis, 95% des procédures se terminent par un "plea bargaining", une négociation au cours de laquelle l'accusé obtient l'annulation de certains chefs d'inculpation en échange du "plaider coupable". Cela permet à la justice d'être beaucoup plus rapide.
Le harcèlement sexuel
Au départ, le harcèlement est une infraction prévue par le Code du travail. En France, le Code pénal ne l'a intégré dans la section consacrée aux agressions sexuelles qu'à partir de 1992. Il est puni de 1 an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende. L'incrimination a évolué avec le temps. A l'origine, le harcèlement sexuel sanctionnait l'abus d'autorité, commis par un supérieur sur son (ou sa) subordonné(e) et supposait le recours à des "ordres, menaces, contraintes ou pressions graves". Depuis la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, le harcèlement est conçu de façon plus extensive. Est désormais puni, sans autre précision, "le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle".
Il en résulte que le harcèlement n'est pas nécessairement le fait d'un supérieur (harcèlement vertical), il peut être commis par un simple collègue de travail (harcèlement horizontal). Les pénalistes estiment que cette définition est trop vague. On se demande, par exemple, si un acte unique est susceptible d'être qualifié de harcèlement ; en principe, le terme inclut l'idée de répétition, mais le texte n'y fait pas référence. Le harcèlement pouvant désormais se commettre par tout moyen, on se demande à partir de quel seuil l'expression d'une inclination amoureuse, pour peu qu'elle soit insistante, devient délictueuse : l'envoi quotidien de roses ou de poèmes enflammés, les petits coeurs expédiés par SMS ou les "je t'aime" désespérés laissés sur messagerie par l'amoureux éconduit peuvent-ils être considérés comme du harcèlement ? Le texte ne l'exclut pas.
Jusqu'à présent, les juges se sont attachés à relever des éléments plus consistants pour retenir le délit (relégation à un poste subalterne ou licenciement de l'employé(e) qui refuse les avances sexuelles de l'employeur, messages téléphoniques obscènes, etc.). Mais cette situation peut évoluer.
A terme, cela pourrait accélérer un mouvement de fond entamé par la société française : la judiciarisation de tous ses rapports sociaux, autrement dit son américanisation. Aux Etats-Unis, le harcèlement est plus codifié. Ce qui permet aux femmes d'aller plus directement et plus facilement au procès. Plus qu'une question de définition, c'est une question de perception de la société tout entière.
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